Expo : 8 femmes artistes exposées à l’invitation du peintre Frédéric Léglise

Willem De Kooning a expliqué que lorsqu’il a fait sa série des Women, certains lui ont dit que peindre des femmes était un retour en arrière et qu’il n’y avait aucune raison de le faire. Il a rétorqué qu’il n’y avait pas de raison de ne pas le faire.

Frédéric Léglise

A l’occasion d’une exposition sur son travail au Centre d’Art Contemporain ÀCentMètresDuCentreDuMonde à Perpignan, Frédéric Léglise a invité 8 artistes femmes à exposer à ses côtés dans « À fleur de peau : Asian Connection » parmis lesquelles Sujin Cho, Ayako David-Kawauchi, Kanaria, Dahye Lee, Mengpei Liu, Inhee Ma, Sujin Stella et Jojo Wang. Le point commun de ces femmes ? Elles vivent en France et sont originaires d’Asie, continent qui inspire et marque l’oeuvre de Léglise. Interview. 

Femmes d’art. Votre oeuvre est directement inspirée par les femmes. Pouvez vous nous parler de votre démarche artistique?

Frédéric Léglise. Quand j’ai décidé de devenir peintre dans les années 90, la peinture était presque interdite, la plupart de nos professeurs disaient même qu’elle était morte. Le seul type de peinture acceptable était l’abstraction. J’ai donc commencé à peindre des tableaux abstraits, tout en étant très impressionné par Picasso, De Kooning, Baselitz, Bacon qui ne sont eux, pas abstraits. J’étudiais à Paris et ma copine vivait en Bretagne. J’ai commencé à lui envoyer des lettres d’amour avec des dessins érotiques. Je me suis rendu compte que j’avais plus de plaisir à faire ces dessins que tout le reste. Ce fut alors le début de ma pratique actuelle. Willem De Kooning a expliqué que lorsqu’il a fait sa série des Women, certains lui ont dit que peindre des femmes était un retour en arrière et qu’il n’y avait aucune raison de le faire. Il a rétorqué qu’il n’y avait pas de raison de ne pas le faire. Cela a été un déclic et le début d’un chemin difficile car presque rien dans le monde de l’art français des années 90 ne ressemblait à ma pratique.

Vue d’exposition – oeuvres de Dahye Lee (à g.) et de Frédéric Léglise (à d.)
Vue d’exposition – oeuvres de Liu Mengpei (à g. et à d.), Sujin Cho (au centre et en haut) et Inhee Ma (en bas).
Vue d’exposition – oeuvres de Frédéric Léglise (à g.) et Dahye Lee (à d.)

Femmes d’art. Pourquoi ce choix de ne présenter que des femmes pour cette nouvelle exposition ? 

Frédéric Léglise. Quand le centre d’art “À cent mètres du centre du monde“ m’a contacté pour une exposition, on m’a proposé soit un solo show soit une carte blanche pour un commissariat. Comme je peins presque exclusivement des femmes, cela s’est présenté comme une évidence et j’ai eu envie de montrer le travail remarquable de ces femmes dont j’aime les oeuvres. 

Femmes d’art. Pouvez-vous nous parler des artistes exposées, comment avez vous découvert leur travail ?

Frédéric Léglise. La rencontre avec ma femme a bouleversé ma peinture : du jour au lendemain, j’étais entouré de ses amies, puis, progressivement, des femmes chinoises sont venues peupler mes tableaux. Parmi ces femmes asiatiques que je fréquente, il y en a plusieurs avec qui je me suis lié d’amitié, et parmi celles-ci, il y a des artistes que j’ai rencontré dans différentes circonstances. Certaines  ont été mes étudiantes (Wang Jojo, Liu Mengpei, Lee Dahye et Cho Sujin) et je continue à suivre leur travail, d’autres ont été rencontrées à travers des expositions ou au hasard de la vie (Ayako David Kawauchi, Kanaria, Inhee Ma et Stella Sujin). Toutes ces artistes que j’invite sont des femmes qui ont grandi en Chine, en Corée ou au Japon mais qui vivent en France depuis quelques années au moins. Elles y ont chacune développé leur pratique, ce qui fait que leur travail est sans aucun doute différent de ce qu’il aurait été, si elles avaient développé leur pratique dans leur pays d’origine. Tout comme le mien aurait été différent sans la rencontre de ce continent à travers les femmes notamment…

Dans les années 90, il n’était pas rare d’entendre des discours rétrogrades, notamment de la part de certains de nos professeurs en école d’art. Ils disaient par exemple que les femmes n’avaient pas besoin d’être artistes parce qu’elles devenaient mères et créaient la plus belle des choses : la vie. Aujourd’hui, heureusement, ce genre de remarques ont disparu.

Frédéric Léglise

Femmes d’art. Quel regard portez-vous sur la place des femmes dans le monde de l’art ? 

Frédéric Léglise. Dans les années 90, il n’était pas rare d’entendre des discours rétrogrades, notamment de la part de certains de nos professeurs en école d’art. Ils disaient par exemple que les femmes n’avaient pas besoin d’être artistes parce qu’elles devenaient mères et créaient la plus belle des choses : la vie. Aujourd’hui, heureusement, ce genre de remarques ont disparu. La place des femmes doit être l’égale de celle des hommes, et elle va enfin le devenir, j’en suis sûr. Les femmes artistes insufflent depuis toujours un vent de fraîcheur remarquable à la scène artistique, je pense par exemple à Louise Bourgeois qui est sans conteste l’une des artistes les plus importantes de l’après-guerre, je pense aussi à Eva Hesse, Ana Mendieta, Chantal Joffe, Joan Mitchell,  Marlene Dumas, Nicole Eisenman, Mickalene Thomas, Yayoi Kusama, et des centaines d’autres…

Femmes d’art. À votre avis, quelle place peuvent et doivent prendre les hommes pour contribuer à mettre davantage les femmes en avant ?  

Frédéric Léglise. Prendre moins de place justement, en multipliant et en partageant les opportunités de montrer leur travail ou bien en collaborant avec elles. 

Propos recueillis par Laurence de Valmy

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